Enzyme
enzyme, protéine agissant comme catalyseur de
nombreuses réactions biochimiques. Actuellement, près de 1 000 enzymes
différentes ont été identifiées. La science qui étudie les enzymes est
l’enzymologie.
Les enzymes participent
à la quasi-totalité des réactions biochimiques
à l’intérieur et à proximité
immédiate d’une cellule. Les enzymes de l’appareil
digestif dégradent les glucides, les lipides et les
protéines qui proviennent de l’alimentation en
éléments simples, facilement assimilables par les
cellules du tube digestif. Certaines enzymes, présentes en
très faibles quantités sur la peau, détruisent la
paroi et le matériel génétique des virus,
participant ainsi à la défense passive de
l’organisme. À l’intérieur des cellules, les
enzymes permettent l’utilisation du glucose, le stockage
d’énergie chimique sous forme d’ATP, la
dégradation des molécules
« usagées », la réplication des
molécules d’ADN, la transcription (voir ARN), la
formation de nouvelles protéines, etc. (voir métabolisme).
Les parties de l'enzyme représentées par des billes de
couleur correspondent au site actif de la molécule.Modélisation de la structure
tridimensionnelle d'une enzyme.
Les enzymes sont des substances extrêmement
efficaces. Elles sont en effet capables, à faible concentration, de catalyser, à
basse température (la température corporelle), des réactions chimiques qui
nécessiteraient, par des voies chimiques ordinaires, de puissants réactifs et
des températures très élevées. Par exemple, 30 g environ de pepsine pure
permettent de digérer près de 2 tonnes de blanc d’œuf en quelques heures !
Les enzymes sont des catalyseurs (terme
proposé en 1823 par le chimiste suédois Jöns Jakob Berzelius), c’est-à-dire des
substances capables d’accroître la vitesse d’une réaction chimique sans être
elles-mêmes modifiées pendant le processus. Lors de la réaction, le ou les
substrats (la ou les molécules « de départ ») sont transformés en un ou
plusieurs produits (la ou les molécules « d’arrivée »). Bien que, dans des
conditions physiologiques normales, l’enzyme catalyse une réaction chimique
déterminée, elle peut également activer la transformation inverse.
Seul un site particulier
de la protéine enzymatique entre en contact avec son
substrat : c’est le site actif. Celui-ci est encore
divisible en deux régions particulières. Le site de
fixation permet à l’enzyme de
« s’accrocher » à la
molécule, et de positionner cette dernière de
façon optimale, tandis que le site catalytique déclenche
le processus réactionnel.
La spécificité des enzymes vis-à-vis de leur
substrat est très variable. Par exemple, la pepsine et la trypsine, enzymes qui
participent aux processus de la digestion de la viande, peuvent catalyser à
elles deux l’hydrolyse de la plupart des liaisons peptidiques existantes ;
d’autres, comme l’uréase, sont extrêmement spécifiques, n’intervenant que dans
un très petit nombre de réactions.
Certaines enzymes possèdent la propriété
particulière d’autocatalyse, qui leur permet d’enclencher leur propre synthèse à
partir d’un précurseur inerte, appelé zymogène. C’est le cas, entre autres, de
la pepsine et de la trypsine, dont les précurseurs sont le pepsinogène et le
trypsinogène. Cette particularité a une incidence biologique : elle permet, dans
le cas de la trypsine, que l’enzyme produite par le pancréas ne soit active que
sur le lieu où elle est nécessaire, en l’occurrence l’intestin. Le trypsinogène
ne peut se convertir en trypsine qu’en présence de molécules de trypsine
existantes, qu’il ne rencontre que dans l’intestin.
Beaucoup d’enzymes ont besoin de la présence
de « cofacteurs » pour jouer leur rôle de catalyseur. Ce sont souvent des ions
comme le calcium, le fer, le magnésium ou le manganèse, qui se lient à l’enzyme
pour lui permettre d’acquérir sa forme fonctionnelle. Les cofacteurs peuvent
également être des coenzymes ; dans ce cas, l’enzyme dénuée d’activité
biologique est appelée apoenzyme. Apoenzyme et coenzyme s’associent pour donner
l’enzyme active. Nombreuses sont les coenzymes dont les précurseurs sont des
vitamines, fournies par l’alimentation.
Des méthodes expérimentales
et des modèles mathématiques permettent de
caractériser l’affinité d’une enzyme pour un
substrat donné et de déterminer la vitesse de
réaction catalysée en fonction de la température,
du pH et de la force ionique du milieu réactionnel. Ainsi, les
enzymologistes démontrent que les réactions
catalysées par les enzymes diffèrent des réactions
inorganiques simples. Par exemple, l’efficacité
d’une enzyme dépend étroitement de la
température : une augmentation de température peut
accélérer une réaction jusqu’à un
certain seuil, au-delà duquel l’enzyme devient inactive.
De même, l’activité catalytique d’une enzyme a
une efficacité maximale à un certain taux
d’acidité (pH de la solution). Par exemple, pour la
pepsine (qui agit dans l’estomac, où
l’acidité est très élevée), le pH
optimal est égal à 1, alors que, pour la plupart des
enzymes des cellules, il est de 7.
Les enzymes sont classées, depuis 1961, en
plusieurs grandes catégories dépendant du type de réactions qu’elles contrôlent.
Ainsi, les hydrolases accélèrent des réactions faisant intervenir des molécules
d’eau, au cours desquelles une substance est décomposée (hydrolysée) en
molécules plus simples. Les oxydoréductases accélèrent les réactions d’oxydation
ou de réduction. Citons également les transférases (transfert d’un groupement
chimique actif d’une molécule à une autre), les lyases (transfert d’un groupe
chimique, avec formation d’une double liaison), les ligases (catalyse des
réactions de synthèse) et les isomérases (réarrangement de la structure
moléculaire du substrat).
Le nom des enzymes est obtenu en ajoutant le
suffixe -ase au nom du substrat avec lequel elles réagissent. Ainsi,
l’enzyme qui contrôle la dégradation de l’urée est l’uréase, celles qui
accélèrent l’hydrolyse des protéines sont les protéases. Certaines enzymes ont
cependant gardé le nom qui leur avait été donné avant la mise au point de cette
nomenclature. C’est le cas, par exemple, de la trypsine, de la pepsine ou de la
papaïne.
Dans le domaine du génie génétique, les chercheurs
utilisent des enzymes spécifiques ne coupant que des séquences d'ADN bien
précises. Il s'agit des enzymes de restriction, dont le grand nombre permet,
virtuellement, d'extraire n'importe quel fragment d'ADN d'un génome.1. Une
enzyme de restriction isole le segment d'ADN humain qui contient le gène
intéressant, celui qui commande la production d'insuline, par exemple. 2. Un
plasmide, fragment d'ADN extrait d'une bactérie, est mis en contact avec la même
enzyme de restriction, et peut alors incorporer le segment d'ADN humain. 3. Le
plasmide hybride est incorporé dans la bactérie, où il est dupliqué comme un ADN
bactérien normal. 4. De très nombreuses cellules filles peuvent être obtenues
par culture. Le gène incorporé permet la production de grandes quantités
d'hormone humaine par ces bactéries.
La fermentation alcoolique et d’autres
procédés industriels importants dépendent de l’action d’enzymes synthétisées par
les levures et les bactéries. Certaines enzymes sont utilisées dans le domaine
médical, pour traiter localement des zones d’inflammation, ou pour éliminer les
matières étrangères et les tissus morts des blessures et des brûlures.
L’utilisation médicale des enzymes peut être
illustrée par les recherches portant sur la L-asparaginase, dont on se sert
contre les leucémies. Cette enzyme entraîne une carence en asparagine (un acide
aminé), surtout au niveau des cellules cancéreuses (qui se divisent de façon
incontrôlée) et hépatiques. L’asparagine faisant alors défaut aux synthèses
protéiques nécessaires aux divisions cellulaires, ces dernières se trouvent
enrayées. Certaines maladies, comme la phénylcétonurie, l’anémie et d’autres
troubles métaboliques, peuvent être liées à des dysfonctionnements enzymatiques,
et pourraient alors être traitées par l’apport des enzymes défectueuses.
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