Les formes de phrase (2)
Les phrases peuvent être classées selon différents
critères : on peut ainsi considérer une phrase selon qu'elle est verbale ou non
verbale, simple ou complexe, selon le type auquel elle appartient (déclarative,
interrogative ou injonctive). Il est également possible de prendre en compte sa
forme.
On distingue huit formes de phrase principales,
rassemblées par paires et pouvant se combiner avec chacun des types de
phrase.
1. Les formes positive et négative
À la différence d'une phrase de forme positive, une
phrase de forme négative contient une négation : l'adverbe négatif
ne, en corrélation le plus souvent avec un autre adverbe (pas, point,
guère, jamais, plus, etc.), un pronom (rien, personne, aucun,
nul) ou un déterminant indéfini (aucun, nul).
Ex. : « Cela ne marcha pas très bien en
classe ce matin-là […]. » (Louis Pergaud, la Guerre des boutons)
La locution restrictive ne… que permet aussi de
construire une phrase négative.
Ex. : Je n'ai que des soucis.
2. Les formes active et passive
Dans une phrase de forme active, le sujet fait l'action
exprimée par le verbe ; dans une phrase de forme passive, au contraire, le sujet
subit l'action exprimée par le verbe. La phrase passive est également
caractérisée par :
— une forme verbale composée de l'auxiliaire être
et du participe passé du verbe concerné ;
— un complément d'agent, précédé de la préposition
par (ou de) et désignant l'agent de l'action ; celui-ci cependant
n'est pas toujours exprimé.
Ex. : « Des bordées d'insultes furent jetées de
part et d'autre en rafales et en trombes […]. » (op. cit.)
Il est possible — quand le sens le permet — de
transformer une phrase passive en phrase active. Des bordées
d'insultes furent jetées de part et d'autre donnerait ainsi : On jeta des
bordées d'insultes de part et d'autre..
L'emploi de la forme passive est particulièrement
recommandé lorsqu'on désire attirer l'attention sur l'être ou la chose qui subit
l'action (ici, des bordées d'injures).
3. Les formes neutre et emphatique
Une phrase de forme emphatique se distingue d'une phrase
de forme neutre en ce qu'elle contient un procédé de mise en relief de
l'un de ses constituants. On peut citer au moins quatre procédés de mise en
relief :
— l'emploi d'un présentatif (c'est… qui/que ; il y a…
qui/que ; voilà… qui/que) ;
— le déplacement d'un constituant en tête de
phrase (le plus souvent, il s'agit d'un complément circonstanciel) ;
Ex. : « Aux billes, c'était lui qui avait le plus
de pouce. » (op. cit.) Dans cet exemple sont mis en relief le complément
circonstanciel aux billes, placé en tête de phrase, mais également le
pronom lui grâce au présentatif c'était… qui.
— le redoublement d'un constituant de la phrase
par un pronom ;
Ex. : « Ce que fut le devoir d'application qui suivit
cette première leçon, on l'apprendra plus tard. » (op. cit.) Dans cet
exemple, la proposition subordonnée complément d'objet ce que fut le devoir
d'application […] est placée en tête de phrase et reprise par le pronom
personnel l'.
— l'accumulation (figure de style qui consiste en
l'énumération d'éléments juxtaposés ou coordonnés) ;
Ex. : « Têtu comme une mule, malin comme
un singe, vif comme un lièvre, il n'avait surtout pas son pareil pour
casser un carreau à vingt pas […]. » (op. cit.)
4. Les formes personnelle et impersonnelle
Pour différencier une phrase personnelle d'une phrase
impersonnelle, il faut considérer le sujet du verbe. S'il ne désigne rien ni
personne, autrement dit s'il s'agit du pronom impersonnel
il, la phrase est de forme impersonnelle.
Ex. : « Il y eut comme d'habitude quelques bonnes
bousculades dans le couloir, des bérets échangés, des sabots perdus, des coups
de poing sournois […]. » (op. cit.)
Dans le cas où le verbe est occasionnellement
impersonnel, le pronom il, appelé alors sujet grammatical,
remplace un sujet logique. C'est le cas, par exemple, dans cette phrase
prononcée par un personnage de la Guerre des boutons : « S'il
passe des gens et que ça les gêne, ils n'auront qu'à ne pas regarder. » Le sujet
grammatical il remplace effectivement le sujet logique des gens.
Si l'on tourne la première proposition à la forme personnelle, on obtient :
Si des gens passent….
On privilégie l'emploi de la forme impersonnelle
lorsque l'on désire mettre l'accent sur l'action exprimée par le verbe.
5. Exemple d'analyse
Examinons la phrase
suivante : « Lebrac, vaincu, dépouillé et
fessé, fut rendu à la liberté dans le même
état piteux que Migue la Lune cinq jours
auparavant. » (op. cit.)
Cette phrase ne contient pas de négation : c'est une
phrase positive.
Le sujet Lebrac subit l'action exprimée par le
verbe rendre : c'est une phrase passive.
L'ordre de ses constituants est conforme au schéma
« sujet + verbe + compléments » : c'est une phrase neutre.
Son sujet Lebrac renvoie à un référent bien
précis : la phrase est personnelle.
L'analyse complète de la forme de cette phrase permet de
mettre en évidence l'effet de « zoom » sur le personnage Lebrac.
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