La phrase complexe (2)
Comme Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le
savoir, nous employons continuellement, dans nos discours écrits ou oraux, des
phrases complexes.
Qu'appelle-t-on précisément une phrase complexe ?
Comment analyser une phrase complexe ? Comment maîtriser sa construction ?
1. Qu'appelle-t-on une phrase complexe ?
1.1. Phrase simple et phrase complexe
Une proposition est un groupe de mots ayant pour noyau
un verbe dont le sujet est exprimé ou sous-entendu. Une phrase contient donc
autant de propositions que de verbes dont le sujet est exprimé ou
sous-entendu.
Si elle n'en contient qu'une seule, on dit que c'est une
phrase simple.
Ex. : [Au début du xxe siècle, les
relations entre la France et l'Allemagne restent difficiles
depuis l'annexion de l'Alsace-Lorraine par l'Allemagne en 1871.]
Au contraire, une phrase complexe est formée de
plusieurs propositions.
Ex. : [En 1917, les États-Unis
entrent dans le conflit] [qui
oppose les pays de l'Entente -France, Royaume-Uni et
Russie- aux empires centraux] : [la guerre est
devenue mondiale.]
1.2. Les différentes sortes de propositions
On distingue trois sortes de propositions :
— la proposition indépendante, qui se suffit à
elle-même car elle ne dépend d'aucune autre proposition et aucune autre
proposition ne dépend d'elle (ainsi, une phrase simple est formée d'une seule
proposition qui est indépendante) ;
Ex. : [Le 28 avril 1919, une Société des nations
(SDN) est créée à Genève pour favoriser les échanges entre
les États et éviter une nouvelle guerre.]
— la proposition principale, dont dépend une ou
plusieurs propositions subordonnées ;
Ex. : [Après la mort de Lénine, Staline
s'installe progressivement comme maître absolu du
pouvoir] tandis que Trotsky est expulsé d'URSS.
— la proposition subordonnée, qui dépend
d'une proposition principale et qui est le plus souvent introduite par un mot
subordonnant.
Ex. : Après la mort de Lénine, Staline s'installe
progressivement comme maître absolu du pouvoir [tandis que Trotsky
est expulsé d'URSS].
2. Les liens entre les propositions
2.1. Juxtaposition, coordination et subordination
Les propositions contenues dans une phrase complexe
peuvent être :
— juxtaposées, c'est-à-dire simplement séparées
par une virgule, un point-virgule ou un deux-points ;
Ex. : [En France, les difficultés dues à la crise
favorisent l'instabilité politique] : [dix-neuf gouvernements se
succèdent de 1929 à 1936.] Cette phrase contient deux propositions
indépendantes juxtaposées.
— coordonnées, c'est-à-dire reliées par une
conjonction de coordination (mais, ou, et, donc, or, ni, car) ou un
adverbe de liaison (d'abord, puis, alors, enfin, en effet, cependant,
etc.) ;
Ex. : [À l'approche des élections de 1936, les partis
de gauche se groupent en une vaste coalition, le Front Populaire,]
et [remportent une écrasante victoire.] Cette phrase
contient deux propositions indépendantes coordonnées.
— subordonnées, c'est-à-dire reliées par un mot
subordonnant (pronom relatif, conjonction de subordination, mot
interrogatif) ;
Ex. : Les accords Matignon signés en juin 1936
établissent des conventions collectives [qui définissent les
conditions de travail.]
Remarques :
— deux propositions subordonnées peuvent être
elles-mêmes juxtaposées ou coordonnées ;
Ex. : Les accords Matignon signés en juin 1936
établissent des conventions collectives [qui définissent les
conditions de travail] et [accordent des hausses de
salaire.] Cette phrase contient deux propositions subordonnées
coordonnées.
— certaines propositions subordonnées, les subordonnées
infinitives et les subordonnées participiales, ne sont introduites par aucun mot
subordonnant.
2.2. Emploi
La juxtaposition, la coordination et la subordination
établissent un rapport logique entre les propositions qu'elles relient. Ce
rapport logique est :
— implicite dans le cas de la
juxtaposition ;
Ex. : Le 18 juin 1940, le Général de Gaulle appelle à
la résistance contre l'occupant : de nombreux Français le rejoignent à Londres
pour constituer les Forces françaises libres. Il y a, entre les deux
propositions juxtaposées de cette phrase, un rapport implicite de cause à
effet.
— explicite dans les deux autres cas, les mots
coordonnants et subordonnants exprimant souvent un rapport logique très précis
(car, en effet, parce que, puisque expriment la cause ; donc, c'est
pourquoi, si bien que expriment la conséquence ; mais, cependant,
toutefois, bien que, quoique expriment l'opposition, etc.).
3. Les différentes propositions subordonnées
La nature d'une proposition subordonnée est déterminée
par la nature du mot subordonnant qui l'introduit. On distingue
ainsi :
— la subordonnée relative, introduite par un
pronom relatif (qui, que, quoi, dont, où, lequel) ;
Ex. : Le haut commandement allemand, [qui
attendait une opération dans le Pas-de-Calais], est tout à fait surpris par
le débarquement des Alliés sur les plages de Normandie, à l'aube du 6 juin
1944.
— la subordonnée conjonctive, introduite par une
conjonction de subordination (que, quand, comme, etc.) ou une locution
conjonctive (dès que, parce que, si bien que, etc.) ;
Ex. : [Afin que le Japon accepte de capituler,]
les Américains se résolvent à lancer une bombe atomique sur Hiroshima, le
6 août 1945.
— la subordonnée interrogative indirecte, introduite par
un mot interrogatif (si, quand, où, pourquoi, comment,
quel, etc.).
Deux sortes de subordonnées ne sont pas introduites par
un mot subordonnant :
— la subordonnée participiale, qui contient un
verbe au participe (présent ou passé) ayant un sujet propre ;
Ex. : Pendant les trente années qui ont suivi la
guerre, [la recherche étant stimulée par la
compétition économique et les commandes militaires,] de nombreux nouveaux
produits apparaissent.
— la subordonnée infinitive, qui contient un
verbe à l'infinitif ayant un sujet propre.
Ex. : En 1969, des téléspectateurs du monde entier
voient [l'homme faire ses premiers pas sur la
Lune.].
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