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Les valeurs des temps passés de l'indicatif

Le français offre une palette particulièrement riche pour exprimer le passé. Au seul mode indicatif, nous disposons de cinq temps.

Quelles sont les valeurs fondamentales de chacun de ces temps ?

1. Le couple passé simple/imparfait

Dans un récit au passé et à la 3e personne, le passé simple sert de temps de base à la narration.

Ex. : « Le joueur de flûte offrit au bourgmestre, moyennant 100 ducats, de délivrer la ville du fléau qui la désolait. Vous pensez bien que le bourgmestre et les bourgeois y topèrent d'abord. Aussitôt l'étranger tira de son sac une flûte de bronze ; et, s'étant planté sur la place du marché, devant l'église, mais en lui tournant le dos, il commença à jouer un air étrange et tel que jamais flûteur allemand n'en a joué. Voilà qu'en entendant cet air, de tous les greniers, de tous les trous de murs, […], rats et souris, par centaines, par milliers, accoururent à lui. » (Prosper Mérimée, « les Reîtres », Chroniques du règne de Charles IX).

Parce qu'il présente l'action comme achevée et limitée dans le temps (aspect accompli et limité), il permet en effet de rapporter les actions successives qui forment le premier plan du récit.

Ses valeurs aspectuelles l'opposent à l'imparfait qui présente l'action comme inachevée, en cours de réalisation (on dit parfois de l'imparfait qu'il est une sorte de présent du passé).

Dans un récit, l'imparfait permet d'évoquer les actions dont on ne connaît ni le début ni la fin et qui forment le second plan du récit ; c'est le temps qui est utilisé en particulier dans les descriptions de lieux ou de personnages. Relisons le début de la nouvelle de Mérimée :

« Il y a bien des années, les gens de Hamelin furent tourmentés par une multitude innombrable de rats qui venaient du nord par troupes si épaisses que la terre en était toute noire, et qu'un charretier n'aurait pas osé faire traverser à ses chevaux un chemin où les animaux défilaient. » (op. cit.)

Dans cet extrait, l'imparfait sert bien à décrire une situation qui pourrait continuer indéfiniment si ne survenait pas un événement qui rompt cette continuité : l'arrivée du joueur de flûte.

L'utilisation abondante du passé simple dans un texte donne l'impression d'un style alerte, dynamique ; pensons à l'écriture de Voltaire (dans ses contes) ou aux romans d'aventure. A contrario, l'emploi de nombreux imparfaits crée un tout autre rythme et suscite un mode de lecture plus lent, plus réfléchi.

2. Les valeurs du passé composé

2.1. Valeurs fondamentales

Selon le cas, le passé composé est employé :

— en opposition avec le présent pour exprimer une action antérieure achevée ;

Ex. : « Les antiquités, surtout les antiquités romaines, me touchent peu. Je ne sais comment je me suis laissé persuader d'aller à Murviedro, voir ce qui reste de Sagonte. » (Prosper Mérimée, les Sorcières espagnoles)

— en opposition avec l'imparfait pour exprimer une action passée achevée.

Ex. : « J'ai loué un cheval et un paysan valencien pour m'accompagner à pied. Je l'ai trouvé (le Valencien) grand bavard, passablement fripon, mais en somme assez bon compagnon et assez amusant. Il dépensait prodigieusement d'éloquence et de diplomatie pour me tirer un réal de plus que le prix convenu entre nous pour la location du cheval, et en même temps il soutenait mes intérêts dans les auberges […]. » (Prosper Mérimée, les Sorcières espagnoles)

Dans tous les cas, le passé composé situe l'action par rapport au moment de l'énonciation.

2.2. Passé simple ou passé composé ?

Parce qu'ils présentent le même aspect accompli, passé composé et passé simple peuvent servir tous deux à rapporter les actions successives d'un récit.

Cependant le passé composé se distingue fondamentalement du passé simple en ce qu'il garde des liens avec le présent (rappelons qu'il est formé avec un auxiliaire au présent) ; il indique que les conséquences de l'action passée restent sensibles au moment de l'énonciation.

Ex. : Mon petit frère est né en 1997 ; il a donc trois ans de moins que moi.

Au contraire, le passé simple évoque une action passée qui n'a plus aucun lien avec le présent, l'emploi de ce temps crée un effet de distance.

Ex. : Son petit frère naquit en 1997.

Le passé composé est donc le temps du récit oral (Ex. : Ce week end, nous sommes allés au cinéma) ; à l'écrit, il est utilisé dans les textes ancrés dans la situation d'énonciation (lettres, récits autobiographiques, etc.). Le passé simple est le temps du récit littéraire. Tous les grands romans du xixe siècle ont été écrits au passé simple ; c'est Albert Camus qui, le premier rompit avec cette tradition, en publiant, dans les années quarante, un roman, l'Étranger, entièrement rédigé au passé composé.

3. Des passés du passé

Plus-que-parfait et passé antérieur sont des temps relatifs puisqu'ils sont le plus souvent employés, en relation avec un imparfait ou avec un passé simple et qu'ils ont, par rapport à ces temps, valeur d'antériorité. En voici deux exemples extraits à nouveau de la nouvelle « les Reîtres » :

— « Souricières, ratières, pièges, poison étaient inutiles. On avait fait venir de Bremen un bateau chargé de onze cents chats ; mais rien n'y faisait. »

— « Il tira de son sac une flûte bien différente de la première ; et, dès qu'il eut commencé d'en jouer, tous les garçons de la ville, depuis six jusqu'à quinze ans, le suivirent et sortirent de la ville avec lui. »

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